1 INTRODUCTION
2 LES POLITIQUES COMMUNAUTAIRES ADOPTEES JUSQU’A PRESENT
2.1 LES EVOLUTIONS AYANT PERMIS L’ADOPTION DE LEGISLATION COMMUNAUTAIRE EN LA MATIERE
2.1.1 La modification des Traités
2.1.2 Les politiques adoptées par le Conseil européen
2.2 LA LEGISLATION COMMUNAUTAIRE EN VIGUEUR
2.2.1 La législation prise en application du programme de Tampere
2.2.2 La législation adoptée en application à la suite du Conseil européen de Laeken et en application du programme de La Haye
2.2.3 Les autres instruments juridiques
3 BILAN DE LA LEGISLATION EN VIGUEUR
3.1 L’indispensable harmonisation des procédures et des critères concernant les pays tiers
3.2 L’augmentation nécessaire du contrôle par les institutions européennes afin de garantir l’harmonisation
4 LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION
4.1.1 L’adoption d’instruments législatifs
4.1.2 La mise en oeuvre et les mesures d’accompagnement
5 LES REACTIONS DU CONSEIL DES REFUGIES ET EXILES A PROPOS DU LIVRE VERT
1 INTRODUCTION
L’instauration d’une politique commune est apparue comme nécessaire depuis 1990 car les Etats membres font face aux mêmes types de difficultés.
D’une part, un afflux migratoire a été constaté avec en 2002 par exemple 381 600 demandes d’asile soit 65% des demandes mondiales.
D’autre part, les Etats membres doivent lutter contre un détournement des procédures à des fins économiques.
Par ailleurs, pour lutter contre la pratique d’ « asylum shopping » qui consiste à choisir le pays destinataire de la demande d’asile, la plupart des pays se sont dirigés vers une politique restrictive.
Cette réaction a entraîné une baisse conséquente des réfugiés et des taux d’une grande disparité entre les Etats membres (de plus de 50% à moins de 1%).
2 LES POLITIQUES COMMUNAUTAIRES ADOPTEES JUSQU’A PRESENT
2.1 LES EVOLUTIONS AYANT PERMIS L’ADOPTION DE LEGISLATION COMMUNAUTAIRE EN LA MATIERE
2.1.1 La modification des Traités
Le Traité sur l’Union Européenne, signé à Maastricht le 7 février 1992 inscrit la politique d’asile et d’immigration parmi les questions d’intérêt commun composant le 3ème pilier du Traité (titre VI du Traité de Maastricht).Le Traité d’Amsterdam, signé le 2 octobre 1997 et entré en vigueur le 1er mai 1999, a ensuite transféré l’objet du 3ème pilier du Traité de l’Union Européenne vers le 1er pilier qui définit les politiques communautaires. Les questions d’asile et d’immigration ont ainsi été intégrées dans le domaine de compétences des institutions communautaires (titre IV du Traité de l’Union Européenne, questions relatives aux « visas, à l’asile, à l’immigration et aux autres politiques liées à la circulation des personnes »).L’article 63 du Traité a par conséquent établi que le Conseil de l’Union Européenne, sur proposition de la Commission ou à l’initiative d’un Etat membre et après consultation du Parlement européen, arrête dans les cinq ans qui suivent l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam des mesures relatives aux : -Critères et mécanismes de détermination de l’Etat responsable de l’examen d’une demande d’asile ; -Normes minimales d’accueil des demandeurs d’asile ; -Normes minimales concernant les conditions à remplir pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ; Le Traité d’Amsterdam est assorti d’un protocole Aznar qui énonce « vu le niveau de protection des droits fondamentaux et des libertés fondamentales dans les Etats membres de l’Union européenne, ceux-ci sont considérés comme pays d’origine sûrs les uns vis-à-vis des autres pour toutes les questions juridiques et pratiques liées aux affaires d’asile ».
2.1.2 Les politiques adoptées par le Conseil européen
Le sommet de Tampere des 15 et 16 octobre 1999 :
Lors du sommet de Tampere qui s’est tenu les 15 et 16 octobre 1999, il a été décidé que les Etats devraient désormais définir un « régime d’asile européen commun » (et non plus de seules normes minimales) fondé sur l’application de la Convention de Genève devant « déboucher sur une procédure d’asile commune et un statut uniforme valable dans toute l’Union ».
Le Conseil européen de Laeken et la Présidence danoise :
Au cours du Conseil européen de Laeken ayant eu lieu les 14 et 15 décembre 2001, les Etats ont notamment affirmé qu’il était nécessaire d’intégrer la politique des flux migratoires dans la politique extérieure de l’Union européenne, notamment par la signature d’accords de réadmission, et d’équilibrer la protection des réfugiés et les capacités d’accueil de l’Union et de ses Etats membres. A la suite du Conseil européen de Laeken, la Commission a adopté le 10 avril 2002 un livre vert sur le retour des personnes en situation irrégulière. De nombreuses organisations internationales intergouvernementales (Organisation internationale pour les migrations, Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés) et non gouvernementales (le Conseil européen des réfugiés et exilés, l’Immigration Law Practioners’ Association (ILPA), Médecins sans Frontières, Save the Children, etc.) ont envoyé des contributions et participé à l’audition organisée par la Commission. Elles se sont, pour la plupart prononcée pour un retour volontaire et non forcé. Quant à la forme des normes à adopter, la Présidence danoise, à l’issue de la réunion interministérielle informelle des 13 et 14 septembre, s’est prononcée conformément à la réaction de certains Etats (Belgique, Royaume Uni et Irlande notamment) en faveur de l’élaboration de recommandations plutôt que de normes communes sur le retour. Celle-ci a cependant souligné la nécessité d’actions concrètes à court terme et le besoin de se doter d’un instrument financier. Le plan d’action que la présidence a proposé le 4 novembre tient compte des réactions des Etats membres, et préconise, sur le modèle du Livre vert : – un renforcement de la coopération opérationnelle entre Etats membres ;– la définition de normes minimales à moyen et long terme ;– des programmes de retour spécifiques à certains Etats, comme celui concernant l’Afghanistan ;– la mise en place d’un instrument financier communautaire en matière de retour ;– une coopération accrue avec les pays tiers. Le programme d’action a été approuvé lors du Conseil « Justice et affaires intérieures » du 28 novembre 2002. La position du projet de traité constitutionnel élaboré par la Convention européenne sur ce point : Par ailleurs, il est à noter que le projet de Traité constitutionnel élaboré par la Convention européenne proposait que les instruments juridiques soient dorénavant adoptés en procédure de co-décision entre le Conseil des ministres, votant à la majorité qualifiée et le Parlement.Le « Programme de La Haye », programme pluriannuel sur cinq ans couvrant le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice a enfin été adopté lors du Conseil européen des 4 et 5 novembre 2004. Ce programme succède au programme de Tampere adopté en 1999.
Le Conseil européen des 4 et 5 novembre 2004 adoptant le « Programme de La Haye »
Lors du Conseil européen de Bruxelles des 4 et 5 novembre 2004, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne ont adopté le « Programme de La Haye », programme pluri-annuel sur cinq ans couvrant le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice. Ce programme succède au programme de Tampere adopté en 1999.Le programme de La Haye prévoit notamment en matière d’asile les mesures suivantes : -L’instauration d’un système européen commun d’asile avant 2010, doté d’une procédure et d’un statut communs s’appliquant aux bénéficiaires du droit d’asile ; -Le renforcement des partenariats avec les Etats-tiers pour aider ceux-ci à améliorer leurs systèmes d’asile, à mieux lutter contre l’immigration illégale et à mettre en oeuvre des programmes d’aide au retour ;-La mise en place d’une politique facilitant le retour dans leurs pays d’origine des étrangers en situation irrégulière ; -La création d’un fond pour le contrôle des frontières extérieures de l’Union avant la fin de l’année 2006 ; -La mise en place opérationnelle, d’ici à 2007, du Système d’Information Schengen II (SIS II) – une base de données regroupant des informations sur des biens dérobés et sur les personnes objets de mandats d’arrêt ; -établissement de règles communes en matière de visas (création de centres de demande communs, introduction de données biométriques dans le système d’information sur les visas).
2.2 LA LEGISLATION COMMUNAUTAIRE EN VIGUEUR
2.2.1 La législation prise en application du programme de Tampere
Lors du Conseil européen de Tampere en 1999, il a été décidé que serait mis en place un régime d’asile européen commun. Ce régime devait comporter, à court terme, une méthode claire et opérationnelle pour déterminer l’État responsable d’une demande d’asile, des normes communes pour une procédure d’asile équitable et efficace, des conditions communes minimales d’accueil des demandeurs d’asile, et le rapprochement des règles sur la reconnaissance et le contenu du statut de réfugiés. Ce régime devait aussi être complété par des mesures relatives à des formes subsidiaires de protection.
L’instauration d’une protection temporaire :
La directive 2001/55/CE du Conseil, adoptée le 20 Juillet 2001 concerne les afflux massifs de personnes. Elle instaure ainsi des normes minimales pour l’octroi d’une protection temporaire dans de telles circonstances aux personnes déplacées en provenance de pays tiers qui ne peuvent retourner dans leur pays d’origine et de mesures contribuant à l’équilibre des efforts entre États membres pour l’accueil de ces personnes et pour supporter les conséquences de cet accueil.Cet accueil est par définition à durée limitée et ne saurait préjuger de l’octroi de l’asile dans les conditions de la Convention de Genève.
L’instauration de règles minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile :
La directive 2003/9/CE, adoptée le 27 janvier 2003 instaure des règles minimales l’accueil des demandeurs d’asile.Ce texte prévoit l’obligation pour les Etats membres d’informer les demandeurs d’asile sur les avantages et leurs obligations dans les 15 jours suivants le dépôt de leur demande. Ce texte prévoit par ailleurs que les demandeurs d’asile doivent recevoir un certificat dans les trois jours attestant leur statut.Les prérogatives des Etats membres concernant l’accès au droit du travail des demandeurs d’asile ont été conservées ainsi que la possibilité de limiter les conditions d’accueil si le demandeur n’a pas introduit sa demande « dans les meilleurs délais raisonnables.
Instauration de règles déterminant l’Etat membre responsable de la demande d’asile
Le règlement CE n°343/2003 du Conseil du 18 Février 2003 instaure des règles et des mécanismes déterminant quel Etat est responsable de la demande d’asile présentée dans l’un des Etats membres par un ressortissant d’un pays tiers. Ce règlement, dit « Dublin II » introduit des assouplissements en matière de réunification des familles et des délais de procédure. Ce règlement maintient les principes instaurés par la Convention selon lesquels le demandeur d’asile ne peut choisir son pays d’accueil et il est permis à tout Etat membre de le renvoyer vers un Etat tiers hors de l’Union[1]. Ce dispositif est complété par le règlement CE n°1560/2003 de la Commission du 2 Septembre 2003 qui met en place un réseau électronique permettant aux administrations nationales chargées de l’examen d’une demande d’asile de s’échanger les données relatives aux demandeurs afin de déterminer l’Etat responsable.
Adoption de mesures concernant le regroupement familial
La directive 2003/86/CE du Conseil adoptée le 22 septembre 2003 concerne le regroupement familial.
L’instauration de conditions minimales pour les ressortissants de pays tiers ou les apatrides demandeurs d’asile
La directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 Avril 2004 définit deux catégories parmi les demandeurs ressortissants de pays tiers ou apatrides. D’une part, la directive distingue ceux qui peuvent bénéficier du statut de réfugié selon la Convention de Genève de 1951. Dans le cadre de ce statut, les auteurs des persécutions pourront désormais être des « acteurs non étatiques ». D’autre part, la directive distingue les demandeurs qui peuvent prétendre à une « protection subsidiaire » car ils risquent la torture, la peine de mort ou qu’ils sont personnellement menacés dans une situation de guerre civile. Les Etats membres ont, en vertu de cette directive l’obligation de veiller au maintien de l’unité familiale, les membres de la famille étant limités au conjoint et aux enfants du bénéficiaire. Par ailleurs, les droits conférés par la directive aux bénéficiaires concernent notamment l’attribution d’un titre de séjour valable au moins trois ans, l’accès à une activité salariée ou non ainsi qu’aux systèmes de protection sociale, de santé et d’éducation du pays d’accueil.
L’établissement de normes minimales concernant la procédure
La directive 2005/85/CE du Conseil, du 1er décembre 2005 établit des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres. Ainsi les demandeurs sont autorisés à rester dans l’Etat membre « aux seules fins de la procédure ». Chaque demande doit faire l’objet d’un examen approprié et individualisé et toute décision de rejet doit être motivée en fait et en droit. Le demandeur bénéficie par ailleurs d’un entretien personnel et a droit à l’assistance judiciaire gratuite et à un recours effectif.
2.2.2 La législation adoptée en application à la suite du Conseil européen de Laeken et en application du programme de La Haye
Le Conseil et la Commission ont adopté le 10 juin 2005 un plan d’action mettant en oeuvre le programme de La Haye et visant à renforcer la liberté, la sécurité et la justice de l’Union européenne. La décision 2006/68/CE adoptée le 5 Octobre 2006 établit un mécanisme d’information mutuelle sur les mesures des Etats membres dans les domaines d’asile et d’immigration.
La Commission a déposé le 6 juin 2007 une proposition visant à modifier la directive 2003/109/CE. Cette directive prévoit l’extension des droits de résidence de longue durée aux bénéficiaires d’une protection internationale résident légalement sur le territoire d’un Etat membre depuis plus de 5 ans. Le statut ainsi instauré garantit à ses bénéficiaires un traitement équivalent à celui des citoyens européens, notamment en matière d’emploi et de sécurité sociale, les autorisant à s’installer dans un autre Etat membre.
Enfin, le 10 Août 2007, le Conseil a émis une proposition instituant un réseau européen des migrations.
2.2.3 Les autres instruments juridiques
La création d’un fonds européen pour les réfugiés
Ce fond est créé par une décision du Conseil du 28 Septembre 2000.Ce fond instaure une aide financière accordée aux Etats membres proportionnellement à leurs efforts en matière d’asile et d’immigration. Le 6 juin 2007, le renouvellement de ce fonds était décidé pour la période 2008-2013.
La création du système Eurodac
Le Règlement (CE) no 2725/2000 du Conseil, du 11.12.2000, a créé le système «Eurodac» dont les modalités d’application ont été déterminées par le Règlement (CE) n° 407/2002 du Conseil, du 28 Février 2002. Ce système permet de stocker et de comparer à cette fin les empreintes dactyloscopiques des demandeurs d’asile mais aussi de tout étranger appréhendé à l’occasion du franchissement d’une frontière extérieure ou en situation de séjour irrégulier dans l’un des Etats membres et ce à partir de l’âge de 14 ans aux fins de l’application efficace de la Convention de Dublin.
3 BILAN DE LA LEGISLATION EN VIGUEUR
3.1 L’indispensable harmonisation des procédures et des critères concernant les pays tiers
L’adoption d’une législation harmonisée
Il a été constaté que l’adoption de normes minimales quant à la procédure et les conditions d’octroi et de retrait correspondent en réalité au plus petit dénominateur commun des législations des Etats membres. Le HCR et les Organisations Non Gouvernementales ont constaté une chute du nombre de demandeurs en Europe (237 840 demandes déposées dans les 25 Etats membres en 2005, selon le HCR). Bien que l’évolution géopolitique puisse expliquer une partie de cette baisse, ces chiffres leur semblent confirmer les réserves soulevées sur le dispositif adopté. Selon ces organisations, il semblerait que ces normes minimales ne respectent pas les engagements internationaux, notamment la Convention de Genève et que les Etats membres sous couvert du respect de ces normes minimales justifient le non-respect de ces Conventions.
La nécessité d’instaurer une base de données commune concernant les pays d’origine
La qualité des décisions adoptées par les fonctionnaires concernant l’octroi ou le retrait du statut de réfugié est fonction de celle des informations concernant le pays d’origine sur lesquelles ces décisions se fondent. En effet, les Etats membres se fondent sur des informations récoltées de façon différente d’un Etat à un autre. Certains Etats ont développé leurs propres bases de données alors que d’autres se fondent principalement sur des données d’organismes externes tels que les ONG et le HCR. Ceci a nécessairement entraîné une disparité entre les décisions des Etats membres. Par conséquent, l’établissement d’une liste minimale commune concernant les Etats tiers est souhaitable. Ce point a fait l’objet d’un contentieux entre le Parlement et le Conseil devant la CJCE après l’adoption de la directive 2005/85 sur les procédures. L’article 29 de cette directive prévoit l’établissement d’une telle liste. Cependant, lors de l’adoption de cette directive, le Conseil n’a, selon le Parlement, pas tenu compte de l’avis de ce dernier qui préconisait qu’une telle liste devrait être adoptée en codécision. Par conséquent, cet article a fait l’objet d’un recours en annulation devant la CJCE, ce qui a entraîné le ralentissement de l’établissement d’une telle liste. Le Parlement considère par ailleurs que l’adoption d’une telle liste ne devrait pas empêcher que chaque demande fasse l’objet d’une évaluation particulière ainsi que le préconise la Convention de Genève de 1951.
3.2 L’augmentation nécessaire du contrôle par les institutions européennes afin de garantir l’harmonisation
L’augmentation du rôle de la CJCE
L’harmonisation des décisions prises par les Etats membres pourrait être facilitée par un contrôle plus actif des décisions et des législations des Etats membres par la CJCE. Pour cela, une modification du Traité CE serait à envisager afin de permettre à la CJCE d’être saisie par d’autres tribunaux que les plus hautes juridictions internes nationales.
Le rôle de la Commission quant à la transposition des directives
Afin qu’une application uniforme de la législation communautaire en matière d’asile soit assurée, il est nécessaire que la Commission bénéficie de moyens matériels de contrôle suffisants. Ainsi, manquant parfois d’effectifs, la Commission a été dans l’obligation d’avoir recours à une externalisation des tâches afin d’effectuer sa fonction de contrôle de la transposition des directives adoptées. Par conséquent, il semblerait nécessaire que la Commission mette en place des équipes de juristes des diffèrents Etats membres ainsi que des traducteurs.
La répartition inégale des responsabilités entre les Etats membres
L’article 10 règlement « Dublin II » énonce que l’Etat membre est responsable de l’examen si le demandeur y a séjourné « au moins cinq mois » avant l’introduction de sa demande. L’HCR dénonce ce principe qui entraîne une externalisation de la responsabilité du « tri » des migrants et notamment des demandeurs d’asile qui est reportée vers les pays situés aux frontières de l’Union.La charge de l’accueil repose ainsi essentiellement sur les pays de l’Est et du Sud de l’Union où l’essentiel des demandes aboutit.
Le contradictoire dans les décisions d’éloignement
Le principe du contradictoire ne semblerait pas respecté dans les Etats membres puisqu’ils coopèrent en utilisant le fichier SIS (dont la version améliorée contiendra des données biométriques et aura des interconnexions avec le VIS) qui a d’ores et déjà permis de renvoyer bon nombre de personnes (dont des demandeurs d’asile) sur la base d’un signalement qu’ils ignoraient et sans possibilité de recours suspensif de l’éloignement.
Il est à signaler qu’un arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme du 26 avril 2007 a affirmé qu’un recours juridictionnel de plein droit suspensif devait être prévu afin que la procédure d’octroi d’asile soit conforme à la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et du Citoyen.
L’ambiguïté des accords négociés par la Commission avec les Etats tiers par rapport aux à la Convention de Genève et la CESDH
La Commission s’est vue confier le mandat de négocier avec un certain nombre d’Etats tiers [8] des accords de réadmission de leurs ressortissants en situation irrégulière ou d’autres étrangers ayant transité par leur sol. À ce jour, quatre accords communautaires ont été signés : avec le Sri Lanka, Hong-Kong, Macao et l’Albanie. Par ailleurs, l’accord de Cotonou signé en 2000 entre les 70 pays ACP (Afrique Caraïbes Pacifique), l’Union européenne impose aux Etats signataires la réadmission de leurs nationaux et prévoit, par une clause générale, la négociation de futurs accords pour la réadmission des étrangers qui auraient transité par leur sol avant d’être interpellés en Europe. Les ONG déplorent que ces accords ne fassent nullement référence à la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et à la Convention de Genève de 1951. Le Parlement les a par ailleurs qualifiés d’« ambigus »
La formation des fonctionnaires se prononçant sur l’octroi et le retrait de l’asile
La qualité des décisions passent nécessairement par la formation et les compétences des fonctionnaires qui les prennent. Certains pays comme le Royaume-Uni et l’Autriche ont décidé de faire appel à un organisme spécialisé dans le domaine de l’asile, l’UNHCR afin que cet organisme leur fasse des recommandations sur les traitements des demandes d’asile. Cette initiative a été saluée par le rapporteur désigné par le Parlement. Le réseau Eurasil instauré en 2002 réunit les praticiens de l’asile. Ce réseau participe nécessairement à l’harmonisation des critères et des procédures concernant le droit d’asile dans les Etats membres. Enfin, la qualité des décisions dépend aussi de la motivation des fonctionnaires qui est un élément essentiel selon l’UNHCR.
4 LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION
La première phase visant l’harmonisation des différents cadres est aujourd’hui terminée. Conformément au programme de La Haye, les instruments de la seconde phase devraient être adoptés d’ici la fin de l’année 2010. Avant de présenter ses propositions, la Commission a édité le 6 juin 2007 un livre vert concernant le futur régime d’asile européen commun ainsi qu’un rapport au Parlement et au Conseil sur l’évaluation du système de Dublin. La deuxième phase du régime d’asile commun a pour but de mettre en place un niveau de protection commun plus élevé et une protection plus uniforme dans l’ensemble de L’Union européenne, et de garantir une plus grande solidarité entre les Etats membres. La Commission a ainsi déterminé quatre domaines dans lesquels une action supplémentaire s’impose : -Instruments législatifs ;-Mises en oeuvre et mesures d’accompagnement ;-Solidarité et partage des charges-Dimension extérieure de l’asile
4.1.1 L’adoption d’instruments législatifs
Le traitement des demandes d’asile
La Commission reconnaît qu’un rapprochement des législations est une condition essentielle pour l’adoption d’une procédure commune à l’ensemble des Etats membres comme le prévoit le programme de La Haye. La Commission préconise pour cela une amélioration de l’accès effectif aux possibilités de soumettre une demande d’asile qui pourrait se traduire par un renforcement des mesures de protection juridique lors de la phase décisive initiale des procédures à la frontière. La Commission propose aussi une harmonisation plus poussée dans des domaines qui n’ont pas été traités par la première phase comme la qualité du processus décisionnel, l’évaluation des justificatifs soumis par les demandeurs d’asile et les procédures de recours. La Commission affirme par ailleurs la nécessité de réévaluer le contenu et la valeur ajoutée de certains mécanismes procéduraux tels que les concepts de « pays d’origine sûr », de « pays tiers sûr » et de « pays tiers européen sûr ». La Commission se prononce aussi pour l’adoption d’une procédure d’asile commune constituée par procédure unique pour l’évaluation des demandes, dans le champ de la procédure, l’ordre dans lesquels les motifs invoqués doivent être éxaminés, les procédures de recours ainsi que les dates limites.
Harmonisation des conditions d’accueil
Cette harmonisation s’avère primordiale pour la Commission afin d’éviter les mouvements secondaires. Cette question est étroitement liée selon la Commission à l’accès effectif des réfugiés au marché du travail. Enfin, la Commission met en avant d’autres difficultés quant au placement des demandeurs d’asile en détention, phénomène qui les prive des droits garantis par la directive 2005/85/CE.
Octroi de la protection
La Commission estime que la directive 2004/83/CE favorise les divergences d’interprétation et d’applications entre les Etats membres. Pour lutter contre ce phénomène, la Commission propose une harmonisation accrue à la fois des critères d’éligibilité et des critères de référence mais aussi des droits et avantages liés à la protection octroyée. Elle propose par ailleurs un rapprochement des droits liés à la protection octroyée (selon que la personne est bénéficiaire d’une protection subsidiaire ou du statut de réfugié) concernant le permis de séjour, la sécurité sociale, les soins de santé, l’éducation et l’emploi. Cela éviterait que les demandeurs orientent leur demande en fonction des avantages et droits liés au statut. La Commission estime qu’il serait judicieux de créer un statut harmonisé pour les personnes qui ne réunissent pas les conditions pour bénéficier d’une protection internationale mais qui, en vertu des instruments internationaux sur les réfugiés et sur les droits de l’homme ne peuvent faire l’objet d’une mesure d’éloignement (pour des raisons de santé ou parce que ce sont des mineurs isolés par exemple). Enfin, elle préconise en cas s’adoption d’un statut applicable à l’ensemble de l’Union la création au niveau communautaire d’un mécanisme de reconnaissance mutuelle des décisions nationales en matière d’asile et la possibilité de prévoir le transfert de responsabilité d’un Etat membre vers un autre lorsque la personne décide de changer de pays.
Questions tranversales
Þ Vulnérabilité La nécessité de prendre en compte les besoins spécifiques des personnes vulnérables a été soulignée par les instruments de la première phase. Cependant, la Commission estime qu’il existe de graves lacunes dans les définitions et les procédures appliquées par les Etats membres pour identifier les personnes vulnérables. La Commission considère par ailleurs que les Etats membres ne disposent pas des ressources, des capacités et de l’expérience technique pour apporter une réponse adaptée aux besoins de ces personnes.La Commission préconise pour améliorer cette situation l’adoption d’une réglementation adaptée (notamment en termes d’identification des besoins), la prise en compte de ces besoins, la mise au point de techniques d’entretien adaptées à ces catégories de personnes, ainsi que l’élaboration de règles plus précises concernant les éléments à prendre en considération dans le cadre de l’évaluation des demandes invoquant une persécution fondée sur le sexe de la personne ou visant spécifiquement les enfants. La Commission souhaite par ailleurs que les capacités nationales soient renforcées. Pour cela, elle se prononce en faveur de l’information et la formation des professionnels concernés (comme les professionnels de la santé, les interprétes, les linguistes, les anthropologues, les avocats, les travailleurs sociaux et les ONG). La Commission envisage éventuellement une fomation communautaire pour ces professionnels, voire des normes communes concernant les qualifications et les compétences requises ainsi qu’un mécanisme de suivi. Þ Intégration La Commission souhaite entamer une réfléxion générale quant à l’amélioration de l’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale. La Commission souligne ici que sa proposition du 6 Juin 2007 qui prévoit l’extension des droits de résidence de longue durée à cette catégorie de réfugiés (et modifiant ainsi la directive 2003/109/CE) devrait, si elle est adoptée, constituer une contribution significative en ce sens. La Commission considère par ailleurs qu’il convient d’envisager un renforcement des normes énoncées par la directive concernant l’intégration des bénéficiaires d’une protection subsidiaire ainsi que la mise au point de programmes d’intégration visant à prendre en compte des besoins pratiques tels que l’accès au logement, aux services sociaux ou aux soins de santé). Enfin, la Commission affirme une nouvelle fois que le droit au travail joue un rôle primordial dans l’intégration. Elle affirme ainsi qu’il est nécessaire de sensibiliser les entreprises à la plus value que l’embauche de bénéficiaires d’une protection internationale représente pour elles. Pour cela, il est nécessaire qu’une attention particulière soit accordée à l’établissement de l’expérience professionnelle, les compétences et le potentiel de ces personnes car elles sont souvent incapables de se fournir les justificatifs dans leur pays d’origine. L’accès à l’acquisition de nouvelles compétences et de diplômes devrait également selon la Commission être privilégié. Þ L’élargissement nécessaire de la législation à d’autres domaines La Commission souhaite déterminer quels sont les domaines actuellement exclus du champ de la législation communautaire pour faire l’objet d’un rapprochement de législation bénéfique.
4.1.2 La mise en oeuvre et les mesures d’accompagnement
La Commission propose trois avancées majeures concernant cette question :
Le renforcement de la coopération entre Etats membres
La Commission prévoit le rapprochement plus poussé des procédures d’asile, des normes juridiques et des conditions d’accueil nationales, ce qui permettra de renforcer la solidarité dans l’Union et de réduire le phénomène d’« asylum shopping ». Ce phénomène est bel et bien réel puisque entre septembre 2003 et décembre 2005 12% des demandes d’asile formulées avaient déjà eu un refus dans un autre pays. La Commission affirme que de nombreuses actions de coopération pratique sont menées dans le cadre d’Eurasil, un groupe d’experts présidé par la Commission. Elle estime cependant que la coopération pratique devrait être étendue à d’autres domaines. La Commission estime notamment que les États membres pourraient adopter des approches communes vis-à-vis des clauses d’exclusion ou de cessation pour certains types de profils, de certains concepts tels que la persécution liée au sexe de la personne ou concernant spécifiquement les enfants, de la détection et de la prévention des fraudes et des abus ou encore de la traduction de documents et des méthodes et procédures à appliquer lors des entretiens.La Commission estime aussi que d’autres domaines pourraient eux aussi bénéficier d’une attention plus conséquente, notamment l’élargissement du cercle des acteurs impliqués dans l’échange de bonnes pratiques, dans le renforcement des capacités, dans les activités de formation et dans la mise au point de lignes directrices, ou encore l’ implication de toutes les parties prenantes , notamment les autorités de recours au niveau administratif ou judiciaire, les linguistes et les experts juridiques, les professionnels de la santé, de l’éducation et de la formation professionnelle, les garde-frontières et les forces de l’ordre.
Le partage des responsabilités et solidarités financières
Þ Partage des responsabilités La Commission a aussi pour objectif d’établir un système juste et efficace en modifiant le système de Dublin qui détermine l’Etat responsable de l’examen de la demande d’asile. La Commission estime en effet que le régime de Dublin a atteint ses objectifs, mais que des questions demeurent quant à son efficacité à réduire les mouvements secondaires. La Commission estime par ailleurs, que les transferts entrant dans le cadre du régime de Dublin se répartissent équitablement entre les pays situés à la frontière et les autres. Cet avis n’est pas partagé par le HCR notamment. La Commission estime néanmoins que ce régime peut induire des charges supplémentaires pour les pays qui disposent de capacités d’accueil et d’absorption limitées. La création d’un régime d’asile commun réduirait selon la Commission les mouvements secondaires. Cependant, la commission estime que ce régime commun ne pourrait faire disparaître totalement ce phénomène et qu’un système de responsabilité quant à l’application par les Etats membres des règles concernant l’asile est nécessaire. La Commission estime enfin qu’une réinstallation communautaire devrait être instaurée, ce qui permettrait de « corriger » le partage des charges entre les Etats membres. Elle considère ainsi que le régime applicable aux résidents de longue durée devrait être appliqué aux bénéficiaires d’une protection internationale. Þ Solidarité financière La Commission souhaite améliorer l’efficacité du Fonds Européen pour les Réfugiés. Pour cela, elle propose que des mécanismes de consultation et d’information voient le jour à l’échelon national, afin de déterminer les lacunes qui pourraient être comblées avec l’appui du Fonds. Elle souhaite par ailleurs déterminer s’il existe des besoins de financement spécifiques insuffisamment couverts par les fonds existants.
Dimension extérieure de l’asile
Þ Aide aux pays tiers pour renforcer la protection La Commission a mis en place des programmes de protection régionaux afin d’aider les pays tiers à faire face aux problèmes liés à l’asile et aux réfugiés et de protéger les réfugiés en leur proposant des formes d’assistance dans leur pays d’origine et de transit. La Commission estime qu’il est nécessaire d’évaluer la mise en place de tels programmes afin de déterminer leur utilité et, le cas échéant les pérenniser. Þ La réinstallation La réinstallation est un phénomène de solidarité de la part des Etats membres envers les pays situés dans la même zone géographique que les pays d’origine qui accueillent la majorité des réfugiés. Ces pays peuvent ainsi avoir des difficultés à absorber de grands nombres de réfugiés en évitant une instabilité économique, sociale, ou politique. Dans certains cas, les réfugiés courent le risque d’être attaqués par des groupes qui leur sont hostiles, ou d’être arrêtés et incarcérés. Par conséquent, la réinstallation dans un pays tiers est nécessaire à la fois pour la protection des réfugiés mais aussi car elle constitue une solution durable. La Commission dans le livre vert se dit favorable au développement de la réinstallation et souhaite instaurer un soutien de la part de l’Union aux Etats membres en ce sens et parvenir à une approche coordonnée.
Les difficultés dues aux flux mixtes aux frontières
Les flux migratoires se présentant aux frontières de l’Union sont souvent composés simultanément de migrants clandestins et de personnes nécessitant une réelle protection. La difficulté augmente lorsque les Etats doivent faire face à un flux massif de migrants et se retrouvent dans une situation d’urgence. La Commission préconise la création d’une équipe d’experts en matière d’asile dont la mission serait d’intervenir temporairement afin d’aider les Etats membres sous pression, à établir les profils individuels lors de l’arrivée des migrants. La Commission se pose par ailleurs la question de savoir quelles mesures complémentaires pourraient être mises en place afin d’éviter que la lutte contre l’immigration illégale ne se fasse au détriment des obligations de protection qui découlent de l’acquis communautaire et du droit international concernant la protection des réfugiés et le respect des droit de l’homme.
La place de l’Union en tant qu’acteur mondial dans les questions liées aux réfugiés.
La Commission constate que le rôle de l’Union européenne dans le cadre du système mondial de protection des réfugiés est devenu important et que les régimes d’asile des diffèrents Etats membres sont perçus comme les composants d’un espace de protection unique, phénomènes qui iront croissant avec l’adoption d’un régime commun. La Commission se demande ainsi comment la politique d’asile de l’Union pourrait se transformer en politique partagée par l’ensemble des Etats membres afin de trouver des solutions sur la scène internationale concernant le droit des réfugiés.
5 LES REACTIONS DU CONSEIL DES REFUGIES ET EXILES A PROPOS DU LIVRE VERT
Le Conseil Européen des Réfugiés et des Exilés a considéré que l’adoption du livre vert était une avancée positive puisqu’elle mettait l’agenda de l’asile alors que cette question était jusque là occultée par celle de l’immigration illégale.L’institution s’est aussi félicitée de ce que la Commission ait décidé de prendre en compte les opinions des Organisations Non Gouvernementales alors que le règlement 2007/2004 sur les équipes d’intervention rapide aux frontières ne donne pas mandat à ces organisations pour aider les services d’octroi d’asile des Etats membres. Le CERE considère de surcroît que la coopération entre les institutions européennes et les ONG devrait être effective et ne pas se limiter à une seule consultation théorique. Le CERE considère comme la Commission que la modification du système de responsabilité pesant sur les Etats est nécessaire. Il estime par ailleurs que si un nouveau système de responsabilité est mis en place, celui-ci devra prendre en compte les disparités entre les différents Etats. Enfin, le CERE considère que la proposition de la Présidence dannoise du Conseil selon laquelle un fond européen devrait être créé afin d’aider les Etats membres à accueuillir au mieux les demandeurs d’asile serait bénéfique. Le CERE considère que l’assimilation des réfugiés au régime des résidents de longue durée envisagé par le livre vert et prévu dans la proposition de directive du 6 Juin 2007 est légitime. Il considère cependant que le délai de 5 ans est trop long et que l’assimilation devrait avoir lieu dès l’octroi du statut de réfugié. Le Centre considère par ailleurs qu’il serait ultérieurement nécessaire d’octroyer aux réfugiés les droits des nationaux et non ceux des résidents étrangers de longue durée. Le CERE estime qu’aucune règle adoptée par l’Union européenne ne devrait réduire le degré de protection des réfugiés. Le CERE considère par ailleurs que des règles communes concernant le retour dans leur pays d’origine des personnes n’ayant pas obtenu le statut de réfugié devrait faire l’objet de règles communes qui organiserait un retour volontaire, dans la dignité et respectant certaines règles minimales. Le Centre estime enfin que la réintégration est une pratique bénéfique et nécessaire alors que seuls 6 des Etats membres ont recours à une telle pratique.
[1] Article 3 du règlement 343/2003/CE